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Les comprimés décongestionnants déconseillés en cas de rhume
La directrice de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), Christelle Ratignier-Carbonneil, a rappelé lundi 23 octobre sur RevolutionMagazine qu’il n’y a pas de risque d’AVC pour un nez bouché. Ces comprimés, tels que Humex, Dolirhume, Actifed, Nurofen, Rhinadvil, contiennent une substance appelée pseudoéphédrine, qui permet de décongestionner les sinus en resserrant les vaisseaux sanguins. Toutefois, il est important de noter que des effets indésirables tels que des infarctus du myocarde et des accidents vasculaires cérébraux peuvent se produire après leur ingestion.
La directrice de l’ANSM ajoute que le risque est très faible, mais qu’il peut se produire quelle que soit la dose et la durée du traitement. C’est pourquoi, pour la première fois, l’ANSM a décidé de déconseiller l’utilisation de ces comprimés. Cette recommandation est soutenue par le Collège de la médecine générale, le Conseil national professionnel d’ORL, l’Ordre national des pharmaciens, ainsi que les syndicats de pharmaciens d’officine. Il est cependant important de souligner que la prise de vasoconstricteurs par voie nasale, en spray, n’est pas concernée par cette recommandation et reste uniquement délivrée sur ordonnance.
Alertes répétées de la communauté scientifique
La communauté scientifique tire la sonnette d’alarme depuis un certain temps déjà concernant les vasoconstricteurs par voie orale, ces médicaments très populaires chez le grand public. La revue médicale Prescrire avait déjà lancé une mise en garde en 2012, estimant que la prise de médicaments contenant de la pseudoéphédrine présentait des « risques disproportionnés » pour les patients. En effet, l’efficacité de cette molécule est jugée faible et les risques cardiovasculaires sont bien réels.
De 2012 à 2017, la base nationale de pharmacovigilance a recensé 40 cas d’effets indésirables graves liés à la prise de vasoconstricteurs oraux, causant même deux décès, selon l’ANSM. Il est important de souligner que dans plus d’un tiers de ces cas (35%), les consignes sur la durée du traitement n’ont pas été respectées. Il y avait également des cas où plusieurs vasoconstricteurs étaient associés ou encore lorsque le médicament était administré à des patients de moins de 15 ans. De plus, près de la moitié des personnes touchées par ces effets indésirables graves présentaient déjà des facteurs de risque cardiovasculaire connus, ce qui aurait dû les empêcher de prendre ces médicaments.
De nombreuses mesures pour réguler la consommation de vasoconstricteurs
En 2017, l’ANSM a ainsi émis une recommandation contre la prise de vasoconstricteurs oraux sans avis médical. En 2019, 2022 et 2023, l’agence a également sollicité les utilisateurs, les patients, les professionnels de santé et les industriels pour envisager des mesures visant à limiter la consommation de ces produits. En parallèle, elle a publié deux fiches pratiques en 2020, l’une pour informer les patients des règles entourant la prise de ces médicaments, et l’autre pour guider les professionnels de santé.
En février 2023, l’ANSM a même saisi l’Agence européenne du médicament (EMA) pour réévaluer le rapport bénéfices/risques des vasoconstricteurs oraux, en vue d’une possible suspension ou d’un retrait du marché européen. Cette décision sera ensuite prise par la Commission européenne et deviendra une loi dans tous les États membres de l’Union européenne. Vous voyez, les autorités prennent cette question très au sérieux !
Les laboratoires contestent la précipitation de la communication
Les vasoconstricteurs oraux sont sur la sellette mais les efforts de communication de l’agence française ont déjà porté leurs fruits. Selon elle, la consommation de ces médicaments a été réduite de moitié, passant de 7,3 millions de boîtes vendues à l’hiver 2016-2017 à seulement 3 millions à l’hiver 2022-2023.
Cependant, compte tenu « de la gravité de ces accidents et de la persistance des cas », en dépit de la baisse de la consommation, l’agence a décidé de franchir une étape supplémentaire en recommandant simplement de ne plus les utiliser, sans attendre une décision européenne.
Gilles Munier, vice-président du conseil national de l’Ordre des médecins, justifie cette décision en soulignant que l’enquête de l’Union européenne est une procédure longue et que les résultats ne seront pas connus avant plusieurs mois, voire plusieurs trimestres. Il est donc crucial que la communauté médicale se positionne dès maintenant, surtout à l’approche de la saison des rhinites saisonnières.
Cependant, l’association professionnelle des laboratoires pharmaceutiques, NèreS, ne partage pas cet avis. Dans un document PDF publié lundi, elle dénonce « une communication prématurée et alarmiste » de l’ANSM, alors même que l’évaluation de l’EMA est toujours en cours. Pour lutter contre les mauvais usages de ces médicaments, elle souligne « l’importance d’une dispensation contrôlée » des vasoconstricteurs oraux en mettant davantage l’accent sur le conseil et le rôle du pharmacien. La présidente de l’ANSM a répondu que, selon elle, la sécurité prime et qu’il est préférable d’agir avec célérité.