Jugement de Monique Olivier : La science pourrait-elle démêler le mystère ?

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N’y a-t-il pas quelque chose de fascinant dans les histoires de « cold case » où l’ADN vient tout chambouler ? Et bien, mardi 12 décembre à Nanterre, les avancées de la psychologie « scientifique » ont eu leur moment de gloire.

Leur chapelle moderne : la cour d’assises. Leur public : deux jeunes psychologues mettant à profit leur expertise, un véritable diaporama de connaissances, incluant des schémas détaillés et une présentation rigoureuse. Le sujet de leur étude était l’accusée, présumée complice de Michel Fourniret dans trois crimes et incapable d’expliquer ses actions. « Je ne me comprends pas moi-même », avoua-t-elle à Sabine Khéris, juge d’instruction, des jours auparavant.

 

L’étude de crimes en série commis en couple est une rareté judiciaire, ce qui rend le rôle de l’ex-épouse de Fourniret, décédé en mai 2021, un champ de bataille pour les experts depuis deux décennies. Mickaël Morlet-Rivelli, psychologue-expert judiciaire à la cour d’appel de Reims et Olivier Dodier, docteur spécialisé en psychologie cognitive, ont fait équipe pour « remettre l’église au milieu du village », autrement dit pour résoudre ce débat complexe.

Leur point de départ ? Un rapport de « 89 pages, sans les annexes », créé à partir de « 38 heures » d’audition de Monique Olivier et de « 23 tests validés scientifiquement ». Chapeau bas à ces chevaliers du savoir qui n’ont pas hésité à questionner les idées établies.

Le mystère du QI de Monique Olivier, une énigme pour les spécialistes

 

Durant la cour d’assises, le duo de psychologues – Mickaël Morlet-Rivelli et Olivier Dodier – a souligné le décalage entre intelligence et personnalité. D’après eux, il existe une idée reçue tenace selon laquelle ces deux facteurs sont systématiquement liés.

Les deux experts ont remis les pendules à l’heure avec une déposition instructive et démystifiante. Parlons un peu chiffres, voulez-vous ? Il se trouve qu’un QI de 131 avait été prêté à Monique Olivier « avant le procès de Charleville-Mezières en 2008 » grâce à une étude conduite par Philippe Herbelot et Jean-Luc Ployé.

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Après avoir effectué leur test, notre charmant duo a conclu que Monique dispose en réalité d’un QI de 92, et comme ils aiment le mettre, elle est « ni supérieurement intelligente ni bête ». Alors, là, on aborde l’effet Flynn selon lequel « le niveau de l’intelligence de la population augmente régulièrement », voilà qui devrait nous faire réfléchir !

 

Un coup de projecteur sur les procédures d’expertises psychologiques

 

Notre duo vedette persiste et signe, la personnalité de Madame Olivier aurait été « mal évaluée ». Illustrant leur point de vue par des camemberts (on adore les graphiques, pas vous ?), ils nous livrent une révélation : seulement « 27% » des tests menés sur Monique Olivier avaient une validité scientifique. Dans leur tourbillon d’explications, ils ont exposé la vérité sans pudeur, déjouant les mauvaises pratiques, déconstruisant les mythes. Scénario inédit en cour d’assises, d’après notre acteur témoin, l’avocat Didier Seban.

 

Mais attention, chers lecteurs, mordez-vous la langue avant de clamer « On n’a jamais vu ça dans une cour d’assises ! ». Les méthodes peu orthodoxes de nos justiciers intellectuels ont été pointées du doigt par l’avocate générale, qui n’a pas manqué de critiquer leur façon de « décortiquer » le travail de leurs collègues qui se sont succédé dans le dossier.

 

La suite… en accéléré !

 

Avec la bénédiction du président, notre duo de choc s’est attaqué au cœur du sujet : la personnalité de l’accusée, tout en nuances et en schémas. Olivier et Morlet ont dressé un tableau vivant de Monique Olivier. Celle-ci, selon eux, est un « sujet réservé », « naïf et influençable », confronté à une « grande anxiété », et qui présente des signes de « personnalité évitante » et « dépendante ». Des traits de caractère qui, encore une fois selon eux, l’auraient conduit droit dans les bras de Michel Fourniret. Et ce, malgré les horreurs. Viols. Meurtres. Tout ça… Tous ces facteurs éclairent peut-être un peu le mystère autour de cette affaire qui a longtemps défié les spécialistes.

Le débat sur le libre-arbitre de Monique Olivier

Ne parlons plus de « d’emprise », terme grossièrement abandonné depuis deux décennies disait Mickaël Morlet-Rivelli. Il préfère l’image d’un système de «  », habilement mis en place par le terrible Fourniret lors de son échange de correspondances avec Monique à la fin de années 80. Celle-ci reçoit dans « 700 pages de lettres », ce qui lui a fait défaut toute sa vie, de l’« affection ». Dès sa sortie de prison, il est déjà trop tard. Le « contrôle coercitif » a déjà pris le dessus. Est-ce la norme de la condition féminine de cette époque, surtout en milieu rural? Est-ce que « divorcer » est vraiment plus difficile qu’avant? Rappelons que Monique avait déjà divorcé deux fois.

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Alors, « Comment une personnalité ordinaire se retrouve complice d’un serial killer ? » s’interroge l’homme aux commandes. « C’est notre grande question à tous, à commencer par moi », confesse le spécialiste. « Je ne peux pas affirmer que Monique Olivier est une victime de Fourniret ». Etait-elle consciente des actes ? Oui. Mais le débat est toujours présent sur sa réelle capacité à agir de manière différente.

 

L’attention se porte ensuite sur les nombreux mensonges de Monique Olivier. Avec des aveux tardifs impliquant plusieurs affaires y compris celles de Joanna Parrish, Marie-Angèle Domèce et Estelle Mouzin, le psychologue Morlet-Rivelli ne croit pas en la théorie de la « jouissance » ou de la « toute puissance » présente dans certaines réflexions prises à la barre. Ni en celle de la « perversité » . D’après lui, « ce mot ne fait pas partie de mon vocabulaire, il appartient à la psychanalyse pas à la psychologie scientifique. ». Toutefois, il invite à la réflexion sur « pourquoi elle cache la vérité », sans pour autant y donner de réponse affirmée.

Le mystère du rôle de Monique Olivier

Nous nous retrouvons à nouveau dans la discussion entre Didier Seban et notre expert de 42 ans, Mickaël Morlet-Rivelli. Maitre Seban pique au vif notre spécialiste : « Vous n’arrêtez pas de dire que vous êtes le seul à avoir compris Monique Olivier ! Avez-vous lu tous les courriers ? » Sans se démonter, Morlet-Rivelli acquiesce. Maitre Seban continue : « Vous nous dites : ‘Elle est contente que quelqu’un s’occupe d’elle.’ Vous oubliez de dire que Michel Fourniret lui annonce le programme, c’est très clair. Il y a les viols et les meurtres ! » Il va plus loin en insinuant « un manque d’expérience » de notre expert : « Avez-vous déjà rencontré des tueurs en série ? » « Des criminels oui, mais des tueurs en série non, répond-t-il. Et des femmes sous contrôle coercitif qui commettent des crimes, c’est rarissime. »

 

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Seban nous rappelle ensuite que Monique Olivier n’a pas seulement « subi » des violences, elle « a fait subir » des violences à d’autres. « Il y a un comportement de participation », reconnaît notre psychologue. « Si vous voulez me faire dire que la participation de Monique Olivier à ces actes reste en partie inexplicable, je vous réponds oui. Je ne suis pas en train de vous dire 1+1=2. » Un peu comme su l’ADN mitochondrial d’Estelle Mouzin trouvé sur un matelas chez la sœur de Michel Fourniret, qui ne prouve pas sa présence à 100%, la science de la psychologie n’apporte pas toutes les réponses sur la personnalité de l’accusée.

 

Le défi de cerner Monique Olivier

 

Un autre expert-psychologue, Jean-Luc Ployé, entre dans la danse : « Tous les experts qui ont travaillé dans ce dossier sont compétents, la difficulté, elle vient de la personnalité de Monique Olivier, il ne faut pas se tromper de débat ». Avec « trente-huit ans de métier », Ployé offre une autre perspective sur la dame, bien qu’avec des techniques différentes.

 

La perversion dans l’ombre

Le vieux loup de mer, Ployé, suggère que Mme Olivier a pris un certain « plaisir dans la souffrance de l’autre ». Il avance : « Pour que ce couple-là ait fonctionné de cette façon-là pendant autant de temps, on ne peut pas exclure chez Madame Olivier une perversion, qui lui est personnelle et qui vient cicatriser chez elle cette quête identitaire du fait de ne pas avoir existé pendant tant d’années ». Une autre experte, Colette Prouvost renchérit : « Elle exprimait une jouissance. Le fait d’être sa muse, sa collaboratrice, ça lui donnait une importance qu’elle n’avait jamais eue jusqu’à présent, une place qu’elle n’avait pas envie de perdre, ça aurait pu continuer comme ça indéfiniment » Et vous, chers lecteurs, qu’en pensez-vous ? Il semble que l’on attend le verdict pour le début de la semaine prochaine. Attendons de voir, le mystère reste entier.

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